4 Octobre 2018
Je pense que dans ce contexte politique et social que nous traversons actuellement il est important d'apporter une vision avec pour seul but de comprendre comment se développe le mouvement des "gilets jaunes".
Cela n'a pas beaucoup de rapport avec les travailleurs handicapés ni avec la formation professionnelle mais cela fait partie des thématiques sociales.
Je vais partir d'un exemple concret pour donner une image assez forte et assez précise de comment est-ce que je perçois ce mouvement. Comme tout un chacun ces dernières semaines, j'ai été bloqué dans les embouteillages, parfois pendant plusieurs heures. Il y a eu des accidents, il y a sur des dérives, mais surtout de l'incompréhension et d'un besoin de reconnaissance.
Il y a cette impression de ne pas être assez impliqué dans les choix politiques, il y a une volonté de faire diminuer les taxes et notamment celle de l'essence. Et même si cette augmentation du prix du carburant été l'étincelle qui a allumé le feu, cela a révélé d'autres problèmes sous-jacents.
Pourquoi payons-nous des impôts ? Pourquoi payons-nous des taxes ? Et si elles augmentent qu'est-ce que cela signifie ? L'état a besoin de plus de financements, de plus d'argent. Alors qu'à une époque, dans ce genre de situation, les pays et les rois partaient en guerre pour piller et annexer de nouveaux territoires, nous ne sommes plus dans cette situation et il faut bien trouver l'argent quelque part.
Le seul souci, c'est que chaque citoyen ne voit pas les résultats concrets de cette augmentation soudaine des taxes. Alors, il existe un réel manque de communication entre le peuple et le gouvernement. Il n'y a pas assez d'implication, de réflexion et de tentative de collaboration entre le gouvernement et le peuple.
Alors, le mouvement des gilets jaune peut se construire en toute légalité. Parce qu'il part d'un bon sentiment, parce qu'il se veut être la voix du peuple, parce qu'il lutte contre l'injustice et la non-reconnaissance de leurs statuts d'hommes et femmes libres ! Ils bloquent la France, ils bloquent les ronds-points, les autoroutes, les supermarchés, les commerces. Ils se réunissent, discutent des raisons de leur colère et finissent par former des groupes, construire des cabanes sur les ronds-points.
Chaque personne peut alors prendre un gilet jaune, descendre dans la rue et bloquer sa rue. Il sera alors rejoint par une autre personne qui viendra l'aider dans sa "résistance". Ils construisent une expérience commune, un souvenir. Dix personnes, cent personnes qui ne se connaissaient pas auparavant se retrouvent "dans la même galère". Leur identité en tant que groupe social "déviant" mais accepté se met en place.
Mais lorsque des milliers de "gilets jaunes" se retrouvent ensemble, la foule qu'ils constituent est alors très sensible aux émotions et aux passions et cela peut dégénérer. Et alors, qu'elle manifestait d'une manière totalement pacifique, il va suffire d'une simple rumeur et parfois d'une minorité pour entraîner cette foule dans le chaos et elle devient alors incontrôlable. Et cela mène aux dérives que l'on voit et que l'on nous fait voir. On ne met pas l'accent sur les hommes et les femmes qui manifestent pacifiquement, parce que cela n'intéresse pas.
Quand c'est la guerre, ou quand la violence est présente, cela devient intéressant. Mais s'il y a résistance du gouvernement, il y a accentuation du mouvement et on passe d'une volonté de manifester pacifiquement à une volonté de "passer à autre chose" pour se faire entendre.
Pour tout vous dire, je ne sais pas vers quoi on se dirige, si cela va rester une page de notre actualité ou si c'est pour nous faire sombrer dans un état de peur, de violence et qui serait alors plus sensible à la manipulation et à la non-réflexion. Comme dans toute lutte sociale, l'un des deux opposants va plier.
Mais quelles mesures feront disparaître cette lutte contre les taxes ? Une diminution de combien entraînera la fin du mouvement ? Est-ce finalement une lutte contre les taxes ou quelque chose de plus ancré, une lutte entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui le désirent, entre ceux qui ont l'argent et ceux qui ne l'ont pas ?
Nous aurons à répondre à ces questions pour trouver des solutions.
Jérôme Jouret est docteur en sociologie et a soutenu sa thèse sur le monde de l'insertion professionnelle des jeunes travailleurs handicapés : entre segmentation et normalisation le 26 janvier 2024 à l'université de Reims Champagne Ardennes sous la codirection d’Emmanuelle Leclercq et Florence Legendre. Il est titulaire d’un master de science de l’éducation, orientation pratique et ingénierie de la formation dans un parcours Handicap et Besoin Éducatif Particulier, d’une maîtrise en psychopathologie et d’une licence en psychologie. Il a réalisé son mémoire de master sur le thème des besoins de formation des travailleurs d’ESAT en Champagne Ardennes sous la direction de Florence Legendre et en partenariat avec l’UNIFAF Châlons en Champagne. Actuellement en poste au sein de l'éducation nationale en tant que Coordonnateur Conseil MLDS ( Mission de Lutte contre le Décrochage Scolaire).
Voir le profil de Jérôme Jouret sur le portail Overblog