15 Janvier 2020
Parler d'insertion professionnelle, est une chose. Parler de handicap, de formation, de recherche d'autonomie et d'indépendance est important.
On peut également parler d'inclusion, d'intégration, d'adaptation. Autant de termes différentes pour tenter de caractériser la prise en charge spécialisée. Mais il existe une partie que je n'ai pas encore abordée, celle des discriminations associées et qui viennent parfois renforcer l'incompréhension, l'ignorance ou même la violence. On va alors parler de l'impact du genre dans le handicap. Que l'on soit un homme ou une femme va avoir de grandes implications au niveau des représentations, au niveau de la prise en charge. La plus flagrante est celle liée à l’accès à l'emploi. Une femme aura plus de difficultés à trouver un emploi qu'un homme, une fois en emploi son salaire sera en dessous de ceux des hommes à compétences équivalentes.
Mais pour une femme en situation de handicap, existe t-il le même type de différences par rapport à un homme en situation de handicap ? Il faut rajouter plusieurs éléments pour tâcher de mieux comprendre ce qui est en jeu ici avant même d'entrer dans le champ des compétences. Les deux personnes ont-elles les mêmes difficultés ? On t-elles les mêmes parcours scolaire, sociaux ? Ont-elles le même projet professionnel ? Ont-elles une reconnaissance en qualité de travailleur handicapé (RQTH) ?
Quel âge ont ces personnes ? Leur handicap est-il du à un accident ou de naissance ?
Comme vous pouvez le voir, avant même de penser à l'insertion professionnelle, il existe une immense mise au point à effectuer. Ce n'est pas le point central dans la recherche que j'effectue, et je n'ai pas de points de comparaisons car la plupart des personnes, des jeunes en situation de handicap que je rencontre sont des hommes ayant un handicap visible ou invisible. Même si cette question de visibilité pourrait largement être remise en question.
Ce sont parfois les représentations à priori qui vont faire apparaître ou non le handicap. Ainsi une personne qui travaille et qui accompagne une personne en situation de handicap au quotidien aura tendance a moins voir les différences alors qu'une personne qui n'aura jamais croisé une personne porteuse de trisomie, ou en fauteuil roulant aura des appréhensions qui viendront gêner la première interaction.
Notre vie quotidienne en lien avec le handicap est à l'image de l'histoire des discriminations. Car on pourrait tout à fait se demander pourquoi est-ce qu'être une femme serait liée à une discrimination ? Depuis quand ? Pourquoi ? Cette discrimination a pourtant tendance à diminuer, mais les représentations mentales et sociales ont du mal à changer. Car il existe une tradition ancrée très profondément dans nos représentations et plus l'histoire est ancienne, plus il est difficile de la remettre en question. Ne pas vouloir changer d'idée est la voie de la facilité, ne pas vouloir s'adapter et évoluer dans nos manières d'agir et de voir le monde est la voie de la facilité.
Voilà pourquoi il est si difficile de faire changer les mentalités, parce que l'on préférera toujours prendre la voie déjà tracée au lieu d'aller explorer de nouveaux horizons. Le parcours professionnel d'une jeune femme en situation de handicap serait alors d'autant plus difficile qu'elle devrait soutenir à la fois la discrimination de genre et à la fois la discrimination liée au handicap. Voilà pourquoi il est essentiel de ne pas choisir la facilité pour lutter contre les discriminations.
Jérôme Jouret est docteur en sociologie et a soutenu sa thèse sur le monde de l'insertion professionnelle des jeunes travailleurs handicapés : entre segmentation et normalisation le 26 janvier 2024 à l'université de Reims Champagne Ardennes sous la codirection d’Emmanuelle Leclercq et Florence Legendre. Il est titulaire d’un master de science de l’éducation, orientation pratique et ingénierie de la formation dans un parcours Handicap et Besoin Éducatif Particulier, d’une maîtrise en psychopathologie et d’une licence en psychologie. Il a réalisé son mémoire de master sur le thème des besoins de formation des travailleurs d’ESAT en Champagne Ardennes sous la direction de Florence Legendre et en partenariat avec l’UNIFAF Châlons en Champagne. Actuellement en poste au sein de l'éducation nationale en tant que Coordonnateur Conseil MLDS ( Mission de Lutte contre le Décrochage Scolaire).
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